Ils étaient tous là hier, costume-cravate, rassemblés au ministère afin de découvrir
le rapport économique annuel présenté par Bienvenu Mukendi devant un parterre de journalistes sélectionnés sur le tas. Pas de badge de presse pour nous, encore moins de carton d'invitation évidemment (qui nous auraient pourtant ouvert la voie vers les tables garnies de petites mignardises et champagne). Mais nous connaissions déjà à l'avance le contenu de la réunion du jour. Le ministre a donc présenté, devant une assemblée conquise,
un rapport économique sans surprises : population jeune, chômage de masse, économie tournée vers l'exportation minière, bref, rien de nouveau à l'horizon. Et c'est là que le bât blesse.
"Qu'aurait pu dire de plus le ministre ?", "la réalité est telle qu'elle est", j'entends déjà les biens penseurs m'assaillir de réponses toutes faites. Et en effet, ce n'était hier qu'une présentation factuelle de l'économie makengaise, et bien faite. Mais c'est justement cela qui pose problème.
Où sont les réponses aux problèmes makengais ? Où sont les perspectives d'avenir pour le peuple makengais ? Ce rapport n'est qu'un avant-goût de ce que sera la future loi de finance nationale, et l'on sait déjà, rien qu'à écouter les pingouins du ministères, qu'elle ne sera que comme toutes les autres lois de finance, comme toutes les autres décisions de ce gouvernement corrompu, sans perspective de changements pour les petits de ce pays. Cela fait désormais
30 ans que Botamba est à la tête du pays, et 30 ans que rien ne change. Chaque année, notre peuple meurt à petit feu, sans nourriture, sans argent, sans espoir, sans avenir. Qu'en est-il de cette jeunesse, décrite hier comme un simple "problème démographique" ? Ce que veut ce peuple, c'est du changement. Des réponses politiques sont exigées partout dans le pays, mais personne n'entend de réponse. Personne n'entend ces plaintes non plus, étouffées par la censure, parfois même par l'auto-censure d'une génération sans perspective et résignée.
Ce que veut ce peuple, c'est de retrouver sa souveraineté, des vrais partis, une vraie opposition, devrais élections. Le Makengo doit reprendre la main-mise sur ses richesses. Il est certain que la loi de finance qui arrive, comme toutes les autres lois, ne permettront pas au Makengo de reprendre le dessus sur ces richesses. Oui la RDM s'enrichira, mais pas les makengais. Et nous pouvons vous révéler un autre scoop sur cette loi de finance : ni éducation ni santé ne seront financés comme il se doivent. A quoi bon développer un système éducatif et de santé publique dans un pays où l'on meurt de maladie et où l'on ne sait ni lire ni écrire. Ah ça, pas besoin de lire et écrire pour porter un fusil. Car comme chaque année depuis 30 ans, notre budget militaire sera réévalué à la hausse. Mais rassurez-vous, pas le salaire des militaires (qui disparaîtra dans les poches des généraux, comme d'habitude).
Pour ne pas nous accuser d'idéologie partisane, nous avons tout de même pris le temps de lire ce rapport, dont le simple résumé était présenté hier. Jeunesse, croissance démographique, économie minière, système fiscal, recettes fiscales... tout y est. Tout ? Non ! Où est passé la réalité de ce pays ?
A
Renaissance, nous pouvons vous la révéler : corruption, état sans pouvoir, pauvreté du peuple et pauvreté morale pour les puissants. Car oui, il n'est état à aucun moment dans ce rapport de la corruption qui détruit ce pays, qui ravage et pourri ce système. Il n'est état à aucun moment non plus de
la faiblesse de cette état, incapable de récolter l'impôt qu'il réclame aux puissants, mais qui vient, le couteau sous la gorge, prendre aux plus petits. Il n'est pas état non plus de cette ultra-élite qui s'engrossie à coup d'arrangements douteux, en pillant notre or et nos forêts.
La vrai réalité makengaise, c'est "Misère, misère, misère".
Misère, pour vous, peuple du Makengo, les petits, les oubliés. Oh oui il est inscrit dans ce rapport que 50% d'entre nous ne vit qu'avec 1$ par jour. Mais est-il inscrit comment nous sommes arrivé à une telle situation ?
Misère, pour celles et ceux qui subissent encore dans ce pays la censure et la torture d'un régime qui n'a que trop duré. 30 ans de Botamba, 30 ans de mascarade de démocratie, à grands coups d'élections, à grands coups de pluralisme de façade. UMD, MSRC, ULD, MLN : tous à la botte de Botamba !
Misère, pour nos entreprises, broyées sous le tapis rouge déroulée aux entreprises étrangères, sous la corruption organisée, sous le raquette étatique, sous le pillage institutionnel.
Misère, pour notre nature, détruite à coup de tractopelles, de produits chimiques, de plantations sans bornes.
Misère, pour cette jeunesse qui, sans avenir, part loin d'ici, en Flavie et dans toute la Dytolie.
Misère, pour ces enfants qui crèvent la faim.
Misère, pour ces vieux qu'on laisse pourrir, sans rien.
Mais ne perdons pas espoir, et réunissons nous pour relever ce si beau pays, et, comme le dit le ministre, "
faire entrer [...] dans le développement et la modernité".